« Gouvernance locale et développement durable. »
Plus personne ne nie la nécessité de prendre en compte le défi climatique qui représente à terme un véritable danger pour la planète – car phénomène évolutif et irréversible – si nous ne changons pas profondément notre façon de vivre, de consommer.
Réduire les émissions de gaz à effet de serre dues à l’activité humaine, mieux maitriser nos ressources énergétiques, voilà une tâche universelle pour laquelle les villes, les grands centres urbains ont une responsabilité particulière.
Pourquoi ?
Parce que c’est là où vit la moitié de l’humanité ; 70% en 2050 et dans nos pays les plus développés 80% dès aujourd’hui.
C’est là où se concentre la plus grande quantité d’émissions de gaz à effet de serre (habitat, transport) mais c’est aussi là où peuvent le mieux s’élaborer les politiques de développement durable qui doivent concilier politique environnementale, solidarité sociale, efficacité économique et citoyenneté.
Il faut donc imposer partout une logique de compétence partagée.
Or, en France pays toujours largement centralisé, mais aussi dans beaucoup de pays à travers le monde, les gouvernements locaux et les villes en particulier n’ont pas toujours la place privilégiée (proximité, expérimentation, innovation et donc préconisation de modèles) qu’ils devraient avoir – à l’image de ce qui s’est passé à Copenhague, sommet qui n’a pas associé suffisamment les gouvernements locaux, dont dépendent pourtant 70% de la mise en œuvre des décisions – . C’est le même ordre de grandeur pour le Grenelle II de l’environnement en France où les collectivités locales représentent environ 75% des investissements civils publics.
Car c’est bien dans les villes que se concentrent les charges sociales : en 20 ans la carte de la pauvreté a profondément changé en glissant du milieu rural vers le milieu urbain.
C’est là que se concentrent les problèmes de déplacements (en une génération, nous sommes passé d’une distance de déplacements quotidiens de 5km/jour à plus de 40 aujourd’hui) et de l’habitat, principales sources d’émissions de gaz à effet de serre.
Mais c’est aussi là que s’élaborent les politiques d’innovations scientifiques et technologiques (avec les pôles de compétitivité et l’économie de la connaissance), sociales et sociétales (avec le vivre et l’agir ensemble, la société multiculturelle et intergénérationnelle) tout autant que dans le domaine des transports, de l’aménagement, de l’urbanisme et de la construction (HQE, BBC)…
Au fond, comme le dit Abdou Diouf, secrétaire général de la francophonie, « le 21ème siècle sera le siècle des villes ou ne sera pas ! » alors que le 20ème a été celui des Etats-Nations avec d’immenses progrès mais aussi deux grandes guerres mondiales, quatre génocides, Hiroshima et Nagasaki !
Certes toutes les villes ne se ressemblent pas (différence de taille, d’histoire, de compétences institutionnelles..) de par le monde. Mais pour tout être humain, le droit à la ville est devenu un droit fondamental, et l’on ne peut pas laisser s’y installer ségrégation, exclusion, frustrations, inégalités ; phénomènes encore accentués par la crise.
Mais c’est dire aussi que bien maitrisée, la ville comme la mondialisation, reste une chance.
(Souvenons-nous que d’Athènes à Rome, de Rome à Paris, de Paris à New York, de New York à Los Angeles, de Los Angeles à Tokyo, de Tokyo à Londres et de Londres à Shangaï, la ville est le creuset des civilisations).
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« Nouveaux Modèles urbains, modèles urbains durables. »
C’est ce que nous avons plaidé à Rio, il y a quelques mois, à l’occasion du forum urbain mondial en évoquant les « nouveaux modèles urbains ».
Et même si à ce jour aucune ville ne peut s’ériger en référence, les échanges de bonne pratique permettent de mieux cerner les objectifs les plus vertueux pour un modèle urbain durable, avec l’aménagement du territoire qui lutte contre l’étalement urbain tout en prônant le droit à la mobilité, encourage la mixité sociale et d’usages, recycle les espaces urbains existants (friches militaires, industrielles, renouvellement des quartiers); avec une politique de déplacements qui développe les alternatives à l’usage de la voiture en solo (transports en commun, modes doux, voitures propres, …) ; avec une politique de l’habitat, neuf et ancien, qui prône la Haute Qualité Environnementale, les réalisations de Bâtiments Basse Consommation.
Or, une telle politique ne peut se concevoir sans Recherche et Développement, sans innovation, sans nouvelles filières industrielles et de services qui sont autant de boosters d’activités économiques et donc d’emplois. De même qu’elle ne peut se concevoir sans appropriation par la population ( il n’y a pas de cité sans citoyens !).
Au total, la ville durable de demain sera le produit d’une vision, d’une ingénierie et d’une dynamique collective, globale.
Et à ce titre, ce ne sont pas forcément les mégalopoles qui seront gagnantes, mais plutôt les centres urbains ou les grandes villes à taille humaine qui par un travail en réseau auront atteint la taille critique permettant une qualité de vie (offre éducative, culturelle, sportive, sociale, sanitaire, environnementale) avantageuse pour les citoyens.
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En Conclusion, nous pouvons dire que le développement durable (ou soutenable) n’a de sens que s’il est humain. On respecte la nature parce qu’on respecte la femme, l’homme, le jeune ou l’ancien.
Le fait urbain est le réceptacle des attentes, des tensions et des besoins, mais c’est aussi le cœur des échanges et l’avenir d’espoir retrouvé.
La cohésion, la paix, la concorde dans le monde seront désormais l’affaire des villes autant que des Etats. La coopération décentralisée, les réseaux des gouvernements locaux en sont les moteurs pour l’échange, l’émulation et finalement pour construire une civilisation à l’échelle du monde, avec la noble ambition de forger une véritable identité universelle.