Avec près de 17 millions d’habitants, Delhi n’est pas la ville la plus peuplée d’Inde. Elle est devancée par Calcutta et Bombay. Mais elle est la capitale.
C’est à elle seule un État et une ville à double face.
D’un côté New Delhi, la ville anglaise, avec ses larges avenues et ses innombrables ronds-points, abrite ministères, ambassades et grandes entreprises. De l’autre côté, Old Delhi, qui, avec ses rues étroites et animées ressemble à l’image traditionnelle des villes indiennes.
L’impression de densité peut y être ressentie physiquement dans cette ville surpeuplée qui a de plus en plus de mal à absorber les 500.000 migrants annuels, venus pour la plupart des États pauvres du Nord et s’entassant dans les bidonvilles périphériques.
En parcourant Delhi, on mesure la complexité et la richesse de l’Inde, d’une histoire peu commune, au carrefour de cultures brassées au cours du temps donnant à ce pays et à sa capitale un visage unique, produit de siècles d’invasions, d’affrontements et d’assimilations.
Des premières civilisations de la vallée de l’Indus aux royaumes et empires des Maurya, des Gupta, aux invasions musulmanes et mongoles, puis à l’arrivée des Européens et à l’Empire britannique, que de changements, de phases de développement, de régression, de barbarie et de progrès se succédant jusqu’à l’indépendance de 1947.
Aujourd’hui, l’Inde fait cohabiter de nombreuses religions : l’hindouisme (80,5%), l’islam (13,4%), le christianisme (2,3%) et le sikhisme (1,9%), le bouddhisme (0,7%), le jaïnisme , le zoroastrisme, le judaïsme…
C’est la deuxième fois que je me rends à Delhi. Il y a quelques années, j’avais participé, en représentant de l’Association des Maires de Grandes Villes de France (AMGVF), à une importante rencontre franco-indienne consacrée au rôle et à l’importance des collectivités locales.
Plusieurs années se sont écoulées et je retrouve la capitale indienne avec les mêmes sensations. Le temps ne modifie pas sensiblement l’impression que l’on a du développement de ce pays-continent, sensation qui tranche avec celle que l’on a par exemple d’une Chine urbaine en perpétuelle mutation.
Il est saisissant de se perdre dans les ruelles animées de la vieille ville, fondée sous le règne de l’empereur moghol Shah Jahan. On y mesure, plus qu’ailleurs dans le monde, ce que signifie densité humaine, embouteillages, déambulations hasardeuses, à pied, en cyclopousses ou en petits taxis au milieu des bus et des voitures. On y découvre tous ces petits boulots permettant à tous de vivre ou de survivre.
La religion reste partout présente et inspirante. La grande mosquée Jama Masjid, le minaret Qutub Minar ou le tombeau d’Humayun laissent apparaître d’indiscutables influences hindoues dans l’architecture et la réalisation de ces édifices musulmans et moghole.
Le Gurudwara Bangla Sahib est probablement l’un des plus beaux sanctuaires sikh en dehors du Temple d’or d’Amritsar, phare de cette confession née en Inde au XVIème siècle.
Delhi ne manque pas non plus de musées.
Outre le Musée national, riche en collections d’antiquités, on ne peut faire l’impasse sur les expositions d’étoffes anciennes ou contemporaines, remarquablement présentées au Musée national de l’artisanat ou (moins connu) au Sanskriti Kendra Museum.
On parle principalement anglais en Inde. C’est la langue véhiculaire qui a bousculé la trentaine de langues régionales et les centaines de dialectes qui se maintiennent à travers cet immense pays.
C’est le principal héritage, avec la conduite automobile à gauche, de la présence britannique.
Il est d’ailleurs frappant de constater, à travers le monde, que le Royaume-Uni, avec ses anciennes colonies, comme par ailleurs la France, l’Espagne ou le Portugal, n’ont pas réussi, en dehors de la pratique de leurs langues, à créer des espaces d’échanges économiques déterminants. On ne peut ignorer que les trois pays aujourd’hui les plus performants (les États-Unis, la Chine et l’Allemagne) ont réussi leurs performances à partir de leurs propres développements, à force de volonté et d’organisation pragmatique.
C’est en ce sens que j’ai toujours pensé que développer la francophonie, c’est faire de notre langue et de notre culture un atout décisif dans le rayonnement politique et l’efficacité économique de notre pays, et non pas cultiver je ne sais quelle nostalgie ambigüe.