C’est à Tirana, capitale de l’Albanie, que l’OTAN a décidé de tenir la session de printemps de son Assemblée parlementaire, en cette fin mai 2016.
Lors de cet événement, Bruno Tertrais, politologue français, maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) est intervenu, avec la pertinence et l’acuité qu’on lui connaît, sur Daech et le terrorisme.
D’entrée, notre conférencier a tenu à préciser que Daech n’était pas le vrai responsable des flux migratoires. C’est la guerre en Syrie, dont le régime syrien est à l’origine, qui en est la cause principale.
La Syrie est devenue l’Afghanistan d’aujourd’hui, ce qui n’est pas encore le cas de la Libye, malgré une situation réellement chaotique.
Au Moyen-Orient, les piliers de Daech tiennent à son idéologie pseudo-islamique et à son objectif d’expansion territoriale. Les jours de l’organisation sont cependant comptés du fait de son excès de violence, tout en restant un réel poison, un défi terrible pour l’Europe…
Il convient de ne pas viser l’entente entre la Russie et l’Iran parce que c’est en réalité ce que souhaite Daech : les sunnites ne supporteraient pas qu’on se tourne vers les chiites.
Même si, par miracle, Daech et le régime syrien étaient défaits, il resterait pendant de longues années la question du retour des réfugiés en Syrie.
Et en cas de disparition de l’organisation terroriste, plusieurs scénarios seraient à imaginer : un « rachat » par Al Qaïda, un déplacement dans une autre zone géographique (en Libye par exemple), une réincarnation sous une autre forme ou bien un dernier coup d’éclat terroriste.
Dans tout cela, que penser de l’action de l’OTAN ?
En réalité, il n’y a pas plus d’intervention au nom de l’Alliance en Libye qu’en Syrie. Et s’il est bien tard pour la Syrie, il n’est pas moins urgent que des pays de l’OTAN se décident à intervenir en Libye, compte-tenu notamment du trésor que représente pour le terrorisme la manne pétrolière de ce pays.
Il n’est pas douteux qu’une telle intervention sera difficile à décider pour les démocraties occidentales, compte-tenu du précédent engagement, désastreux, de 2011… Rappelons par exemple que l’OTAN n’a pas été saisie par la France après les attentats de Paris
En réponse aux différentes questions posées par l’auditoire, Bruno Tertrais est revenu sur quelques points.
Ainsi, il a tenu à préciser qu’à ses yeux, les gouvernements autoritaires (notamment en Asie Mineure), contrairement à ce qu’on croit généralement, ne sont pas des remparts contre l’expansion des groupes terroristes.
Par ailleurs, la concurrence entre Daech et Al Qaïda n’est pas finie. On peut même émettre l’idée d’une reprise violente, à terme, de Daech par Al Qaïda, dès que cette dernière organisation se sera redonnée un responsable d’envergure.
À l’origine de Daech, il y a l’Irak de Sadam Hussein, Al Qaïda et enfin Bachar El Assad. Sur son expansion, on doit bien sûr citer la Russie et la Syrie qui ont eu intérêt à voir Deach se développer pour justifier l’intervention du régime syrien. Mais, par ailleurs, on peut penser que les hésitations initiales de la coalition internationale sont aussi, en partie et malheureusement, responsables de la situation actuelle.
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