Avant d’en venir à l’ordre du jour de notre conseil et à l’examen du budget primitif, j’entends rendre hommage à Cécil Guitart, qui nous a quittés brutalement il y a 10 jours.
L’annonce de son décès a été pour nous tous un choc. Avec sa disparition, Grenoble a perdu un des plus ardents défenseurs des politiques culturelles et de l’égalité des chances
Cécil Guitart était le fils d’un républicain espagnol, qui après avoir connu le camp d’Argelès, rejoignit la Résistance dans les maquis de la montagne noire.
Enfant d’immigré, il avait du monde et des hommes une vision le conduisant à déceler l’injustice et à vouloir la réparer.
Enfant de résistant, Cécil était viscéralement attaché à la liberté. Il était aussi très respectueux de l’héritage de la Résistance. Il aimait à rappeler que l’éducation populaire avait trouvé son inspiration dans la Résistance et plus particulièrement dans les réflexions menées au sein de l’école des cadres d’Uriage, qui irriguèrent après sa dissolution en 1942 les maquis de Vercors, d’Oisans ou du Grésivaudan.
C’est à Bernard Gilman que nous devons son arrivée dans notre ville. Directeur des bibliothèques lors du dernier mandat d’Hubert Dubedout, Cécil Guitart s’attacha à professionnaliser l’action des bibliothécaires, plaidant pour la présence conjuguée d’équipements phares et d’équipements de proximité, développant la coopération entre les bibliothèques et les écoles, attentif à la prise en compte des publics éloignés de l’écrit.
C’est à lui notamment que nous devons de pouvoir proposer un formidable réseau de bibliothèques, présent dans tous les quartiers de notre ville et dont il avait su faire de véritables lieux de vie culturelle. Il aura été, aux côtés de Bernard Gilman et de René Rizzardo, l’artisan de l’excellence grenobloise en terme de lecture publique.
Après avoir quitté Grenoble, nommé conseiller pour le livre et la culture à la DRAC Rhône-Alpes, il fait alors travailler les bibliothèques en réseau et rassemble les compétences pour favoriser une forme d’aménagement culturel du territoire. C’est sur sa proposition que sera créée l’ancêtre de l’Agence Rhône-Alpes pour le Livre et la Documentation. Nous lui devons également la création du Centre de Formation aux Métiers du Livre et des Bibliothèques, rattaché à l’université.
Quelques années plus tard, après avoir été membre du cabinet de Jack Lang et DRAC de la Région Auvergne, Cécil sera nommé Directeur du Musée des Arts d’Afrique et d’Océanie. Poste auquel il était en quelque sorte destiné tant son parcours familial le rendait sensible à l’histoire et au sort des peuples colonisés.
Cette ouverture au monde trouva également à s’exprimer lorsqu’il rejoindra l’équipe municipale. Avec Jean-Jacques Gleizal et Alain Pilaud, il fut en effet de ceux qui donnèrent sens et consistance à notre coopération décentralisée avec Ouagadougou, se faisant ambassadeur du projet de Reemdogo.
Professionnel apprécié et reconnu, Cécil Guitart fût un aussi citoyen engagé ; engagement qu’il mit au service de la solidarité entre les hommes.
Nourri des idées de l’éducation populaire, Cécil Guitart aura été un des principaux compagnons de route de Peuple et Culture dont il a été président. L’éducation populaire a constitué le second pilier de son engagement citoyen.
Développement culturel solidaire, c’est à lui que nous devions l’intitulé original mais ô combien pertinent de la délégation qu’il a exercé lors du précédent mandat.
Adjoint au maire, membre du groupe des élus GO, Cécil fut un collègue passionné et passionnant, exigeant dans l’élaboration de nos politiques culturelles et éducatives. Je garde un souvenir fort de nos échanges sur la réouverture de la MC2, sur l’organisation des expositions décentralisées du Musée et sur les évolutions à apporter aux politiques socioculturelles. Une des belles réussites de Cécil fut précisément d’avoir porté le projet de réalisation du Plateau qui fait aujourd’hui référence. Il aura également en permanence recherché les meilleurs moyens de favoriser les initiatives et l’autonomie des jeunes, notamment en accompagnant la création et le développement de la Bifurk, du Ciel et de la Chaufferie. Avec Sadok Bouzaiene, Jean-Philippe Motte et Alain Pilaud, il permit enfin l’intégration pleine et entière de la dimension sportive, aux côtés de l’éducation et de la culture dans les politiques enfance et jeunesse de notre ville.
Bon vivant, amateur de grands vins, cultivé, drôle, Cécil était aussi écrivain. Les titres de ses ouvrages ‘’Tutoyer le savoir’’, ‘’Transmettre le savoir’’ ‘’ La bataille de l’imaginaire’’ illustrent l’homme qu’il fut. Il était aussi un des auteurs du très beau livre ‘’Grenoble, l’histoire d’une ville’’ récemment paru. Il consacrait depuis plusieurs mois ses réflexions à l’économie de l’information et de la connaissance. Preuve que son attachement pour Grenoble mais aussi que sa curiosité et son désir de faire comprendre notre monde étaient intacts.
Au nom de tout le conseil municipal, je veux dire à sa famille, à ses proches, à ses très nombreux amis une nouvelle fois toute mon émotion et renouveler les condoléances de la Ville de Grenoble.