Dans un mois aura lieu le renouvellement des conseils municipaux. Un moment important où la population portera une appréciation sur l’action de la municipalité sortante et sur le projet proposé pour le mandat à venir. Maire de Grenoble depuis 19 ans, il me parait utile et démocratique de revenir sur ce parcours municipal qui s’interrompra pour moi en mars prochain, ayant décidé de passer le relais à une équipe renouvelée, conduite par mon 1er adjoint Jérôme Safar. Je reviens donc, par une série de tableaux que je souhaite vivants et personnels, sur une activité qui marquera sans nul doute un moment exceptionnel de ma vie.
L’enjeu majeur pour les villes, c’est la question de la qualité de la vie, du plaisir que les habitants trouvent à vivre ici plutôt qu’ailleurs. Cette question n’était pas gagnée il y a quelques décennies, quand notre ville perdait des habitants, et que le modèle dominant pour les familles était d’habiter à l’extérieur de la ville, dans une maison individuelle. C’est une alchimie complexe dans laquelle tout compte : l’habitat, l’espace public, les équipements éducatifs, culturels et sportifs, l’intensité de la vie urbaine et la qualité des échanges avec les autres.
A Grenoble, la principale vision de la métamorphose de notre ville, qui frappe aussi bien les habitants qui se souviennent que les touristes de passage qui traversent notre cité, c’est celle des grands boulevards. Le tram C, avec le symbole extraordinaire de la démolition de l’autopont sur le cours de la Libération, a été une étape majeure dans notre action, qui a profondément changé l’image de la ville. Quand le tram arrive, avec ses rails enherbés et ses grands trottoirs, sur ce qui était une véritable « autoroute urbaine », c’est toute la vie qui change. Les habitants (re)prennent possession de l’espace public ; les boulevards deviennent un trait d’union entre le nord et le sud de la ville au lieu d’être une frontière.
Cette transformation un peu magique, Grenoble va encore la connaître en 2014, avec la prolongation de la ligne B sur la Presqu’Ile, qui apportera « la ville » au cœur de ce territoire un peu aride encore réservé aux chercheurs, et surtout avec la ligne E sur son avenue la plus fameuse, le cours Jean-Jaurès et le cours de la Libération.
Ces chantiers auront été de taille, sur des voies de circulation majeures, et il aura fallu une grande confiance de la part des Grenoblois pour en supporter les nuisances. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui nous pouvons légitimement partager la fierté de l’avoir fait, ensemble !
L’espace public, ce sont aussi les places et les parcs. Le projet « Cœur de ville, cœur d’agglo » vise en particulier à rendre ces places aux habitants et aux visiteurs, sur les quais et dans les quartiers du centre-ville, pour en faire là aussi des lieux de convivialité et de rencontre. Enfin, alors que nous savons que l’espace est rare dans notre ville, nous avons réussi à agrandir et revitaliser profondément le Parc Paul Mistral, à créer des parcs dans les quartiers (Jardin des Poètes à Vigny-Musset, Parc Ouagadougou à Teisseire-JO, Jardin des Vallons à De Bonne), aujourd’hui plébiscités par tous et en particulier par les familles.
Les quartiers, c’est l’âme de la ville pour ses habitants, souvent leur première référence. A Grenoble comme dans d’autres villes, ils étaient en 1995 de nature très diverses : il y avait les vieux quartiers du centre, les faubourgs qu’on avait laissé se dégrader, les grands ensembles des années 60 et 70 qui concentraient souvent les difficultés sociales, les friches industrielles et militaires… Aujourd’hui force est de constater que nous sommes intervenus partout, avec des outils et des solutions différentes mais avec la même exigence de qualité, en suivant la philosophie du développement durable qui veut que toutes les dimensions, sociales, économiques et environnementales, soient regardées en même temps.
A Mistral, à Teisseire, à Villeneuve, à Châtelet, ce sont de grandes opérations de renouvellement urbain qui permettent de retourner le poids des ans, d’affirmer que ces quartiers ont un avenir quand on se remonte les manches, quand on choisit d’investir en même temps sur le logement, sur les équipements, sur l’espace public, avec le même niveau d’exigence que dans les éco-quartiers tout neufs, et quand on fait l’effort de les relier avec le reste de la ville.
A la caserne de Bonne, c’est un nouveau quartier en pleine ville, résolument fondé sur l’idée de mixité sociale et fonctionnelle, où on a poussé aussi loin que possible les principes de la ville durable, en entraînant tous les acteurs (bailleurs sociaux, promoteurs privés, entreprises de construction, gestionnaire de centre commercial, …) dans une démarche d’innovation collective qui « montrait la voie ». Bouchayer-Viallet a été conçu sur des principes similaires et est aujourd’hui également labellisé « Eco-Quartier ».
A Flaubert et à l’Esplanade, comme hier à Jean Macé, on aborde des quartiers qui ont vieilli, un peu à l’écart du reste de la ville, où les habitants souhaitent en même temps de nouveaux aménagements et le respect de ce qui existe. Dans ces quartiers, on commence par investir dans les équipements collectifs, le parc de Flaubert et le tramway sur l’Esplanade, on prévoit de rénover les logements existants et d’insérer les nouvelles constructions dans le tissu existant, avec un respect particulier du patrimoine en zone AVAP.
La ville et les quartiers ont enfin besoin d’équipements pour être de véritables lieux de vie. D’abord des écoles, pour lesquelles nous avons lancé dès notre arrivée en 1995 un vaste plan de rénovation, complété par de nouvelles constructions (le Verderet, Lucie Aubrac, Beauvert). Ensuite les collèges et lycées, qui ont fait l’objet de requalifications remarquables. L’ouverture en 2001 de la Cité Scolaire Internationale est dans ce domaine une de mes plus grandes fiertés, comme lieu d’ouverture au monde et d’accueil des nombreuses familles venues de tous les horizons pour enrichir le « melting pot » grenoblois.
Les équipements sportifs jouent un rôle particulier en faveur de la cohésion sociale. Que ce soit pour la pratique du plus grand nombre ou pour le plaisir de se retrouver pour soutenir nos équipes qui brillent dans les championnats, doter notre ville d’infrastructures à la hauteur de ses ambitions a été un grand défi avec de belles réalisations : Pôle Sud, Stade des Alpes, nouvelle piscine des Dauphins et rénovation de Chorier-Berriat, nouvelle halle de tennis.
Dans le même esprit, le développement des équipements culturels, avec une grande diversité de vocation, de tailles et de styles, a occupé une part importante de nos investissements et contribué à ce renouvellement de la ville dans le respect de son histoire. La MC2 : a trouvé un nouveau souffle grâce à une rénovation et un agrandissement exemplaire avec en particulier la rénovation d’une salle de concert enviée de toutes parts. La médiathèque Kateb Yacine apporte une dimension nouvelle au centre commercial Grand’Place. Le multiplexe Chavant comme le nouveau Méliès redonnent une place au cinéma dans le centre-ville. La « Belle électrique » viendra bientôt compléter le paysage de Bouchayer-Viallet.
Ces projets ont contribué à changer l’environnement et l’image de notre ville pour ses habitants et ses visiteurs. Ils ont aussi créé de l’activité pour les entreprises locales, avec des emplois non délocalisables à la clé, accompagnés d’efforts de formation et d’insertion tout à fait essentiels. Finalement, si les Grenoblois valorisent ces réalisations en tant qu’acteurs et spectateurs, ils en ont souvent été aussi les concepteurs et les constructeurs.